lundi 17 mai 2010

Eroscalade 2010 texte 10 - Viré de la vire

Viré de la vire


Nous nous sommes rencontré dans une salle qui pue des pieds en banlieue parisienne.
Une de celle ou la lumière poussiéreuse des néons blafards donne plus envie de grimper en falaise que de traîner le soir à enchaîner la voie verte ouverte par Cliff Allen.


Cela s'est passé plutôt naturellement cette rencontre.
Je me changeais dans le vestiaire quand elle poussa la porte en s'écriant, " ah, désolé, j'pensais être dans le vestiaire des femmes ! "


La porte se referma, notre rencontre s'arrêta là, jusqu'à l'ouverture une seconde fois, sa silhouette se dessinant à merveille.


" Ben en fait, y'a pas de vestiaire femme ! "


" De toute façon je suis prêt, je vous laisse la place. "


Mon survêt troué au genou frôla son tailleur gris quand nous nous croisons.


" Vous avez un partenaire ? "


" Non, enfin disons que je venais plutôt faire du bloc. "


" Comme vous voulez, en tout cas si vous souhaitez faire du mur, j'peux vous assurer. "

C'est dans la grotte que je la retrouvais, le tailleur gris échangé en collant moulant.


" Au fait, moi c'est Bradd et vous ? "


" Pénélope. "


" Plutôt bloc alors ? "


" Oui, en fait je connais que ça, pas facile la falaise dans nos contrées. "


La séance se déroula dans la grotte, il y faisait encore plus nuit que dans la salle.


La semaine suivante, fut identique, puis la semaine d'après idem, toujours le même collant moulant, toujours les trous dans mon jogging.


Le seul espace de convivialité de cette salle était le bar, et dire qu'on en ferme autant qu'on ouvre d'agence immobilière par chez nous ...
Un mois après notre première rencontre, c'est au bar justement que nous finîmes notre séance de bloc.


La bière est le meilleur ami de l'homo grimpus timidus, elle libère le houblon qui est en lui, extermine l'acide lactique et liquéfie le neurone bloqué du dragueur en herbe


3 bières plus tard (elles ne sont pas fortes, on est quand même dans une salle de sport) on a planifié la suite.
Trouver une date pour dîner ensemble, grimper en falaise aux beaux jours et démarrer ma voiture sur le parking avec les câbles raccordés au bornes de la batterie de sa bagnole.


Le dîner n'a attendu qu'une semaine pour se déguster, les beaux jours eux par contre se sont fait attendre.


1er mai, c'est bien l'1er mai c'est la fête du travail donc on ne travaille pas.


Direction le sud, avec sa voiture, la mienne est dans le même état que mes jogging.


On a eu le temps de réviser tout cet hiver, installer un relais, assurer le second, grimper en réversible, le petit grimpeur de grande voie est resté sur la table de nuit, désormais tout est acquis.


C'est dans des grandes voies que nous avons décidé de continuer le début d'une grande histoire.


C'est parti, collant moulant en tête, jogging troué à l'assurage, premier relais, plaquette en place, départ ! lovage de corde, et c'est reparti, jogging troué tremblant en L2, L3 collant moulant me passe entre le baudrier et la falaise, vraiment moulant dirons nous .... L7 la vire, celle ou aucune agence immobilière n'est venu remplacer un troquet, pourtant y'a de la place pour un comptoir de 20 mètres et un appartement témoin cote à cote.


La pause.
On est posé.
La corde est lovée à nos pieds.
Nous nous lovons.


Ce n'est pas le premier baiser qu'elle me donne, mais celui là est plein de sensualité et de barre chocolatée.
Nos langues ne firent qu'une, parfois dans sa bouche, parfois dans la mienne.
Très vite nous nous retrouvons nu, mon baudrier à mes pieds, le sien toujours en place, tel le porte jarretelle de l'aventurière.
Elle me grimpe dessus, en tête, puis je place une lolotte entre sa cuisse et son aisselle gauche.
Nous franchissons tous les obstacles avec une certaines aisance, les Oh toi ! et les prends moi sec résonnent et rebondissent contre la falaise.
Le crux arrive, je suis debout, bien sur mes pieds, elle atteint ma dégaine, monte, redescend, remonte et dans un râle de bonheur elle s'agrippe à la prise de sortie.


Et là, tout va trop vite, sa main agrippe mon bras couvert de sueur, sa tête retombe en arrière, ses cuisses glissent le long de mes hanches.
En un mouvement brusque je me retrouve sur le cul assis au bord de la vire, elle chutant à plat dos en plein vide.
La corde encore nouée à son baudrier se dévide du lovage à mes pieds.
Puis plus rien.


Seul sur la vire, j’appelle les secours.
En à peine 15 minutes j'entend de l'agitation 100 mètres sous mes pieds.
Il m'aura fallu attendre 1 heure de plus pour voire arriver 2 pompiers du haut de la falaise.
Sans un mot, nous redescendons ensemble les 100 mètres nous séparant de l'impact.


Entouré des secours, le corps nu de Pénélope gît là, drapé de la corde qui l'avait suivi dans sa chute.
Nous l'avions choisi ensemble cette corde, le rose lui allait si bien.

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