Ce texte avait été envoyé par Aurore Delahaye. Aurore et son mari François ont dévissé du Canigou il y a quelques semaines. Voici en préambule un texte de Jean-Pierre Banville:
"J’appréciais beaucoup Aurore qui était une C2C-iste et une passionnée du Canigou. Elle m’avait offert d’y aller avec moi lors de mon prochain voyage en France. Je lui ai expliqué que je ne fais plus d’alpinisme depuis longtemps et que de toute façon elle devait être trop légère pour m’assurer. Elle avait un plume incroyable et aurait pu en vivre.
Que faire? Pour le concours??
Et bien je vais offrir le texte d’Aurore à tous comme lecture hors concours. Il est excellent et j’aimerais bien qu’on puisse le garder en quelque part en mémoire, pour ne pas oublier. Vous savez, comme tous ceux qui avaient la passion et qui sont passés avant nous …
C’est la première fois qu’une telle chose m’arrive et, bien que blindé face à la mort – la mienne comme celle des autres – j’ai horreur des disparitions et de l’oubli. On est réellement mort que lorsque plus personne ne pense à nous!
Si quelqu’un a une idée pour faire vivre son texte à jamais, qu’il me le fasse savoir. Pour le moment, vous pouvez le lire sur votre site web favori.
La montagne est une maîtresse cruelle. Mais qu’est l’existence sans l’amour d’une maîtresse? Une vie sans passion???"
Éliane
Les lianes l'enlaçaient ...
Elle était là, au milieu de nulle part, en tenue d'Eve, des cordes végétales courant sur son corps sublimé par l'effort. Elle baignait dans le bonheur, approchant les sommets du plaisir. C'était complètement irréel.
Elle était pourtant l'Alice du pays où grimper rime avec cordée. La corde ... Elle aimait la sentir qui l'ancrait à l'autre, alliance de sensualité et sécurité, pour le meilleur ou pour le pire ... Pour jouir pleinement et maintenir la tension jusqu'au bout, elle savait devoir soumettre son corps aux règles de matelotage et elle avait appris l'art des manip's.
Son imagination n'ayant, elle, aucune attache, elle était Ariane, Pénélope ou une autre, liée à un Cupidon et "condamnée" à le poursuivre toujours plus haut.
La cordée prenant corps, tous deux s'ébattaient ensuite dans un jeu de chat perché un peu particulier. Parfois, elle en prenait les commandes, s'essayant à la direction de l'orchestre avec doigté, pour une interprétation du topo qu'elle espérait Magnificat...
Qu'importe la position et quelle que soit la clef, le plaisir pouvait apparaître. Dans ces moments, ni le temps, ni la mesure ne comptaient. Elle savait que, tôt ou tard, elle arriverait à l'acmé où ils se rejoindraient. Alors, la corde ne serait plus nécessaire et, les noeuds disparus, leurs corps se loveraient l'un sur l'autre et elle (ils) crierai(en)t son (leur) bonheur, celui de toucher les cieux ...
Mais là, elle était seule, libérée de toute entrave, pour jouer autrement et, peut-être, atteindre une autre extase. Son compagnon en avait fait l'expérience mais leurs vibrato étaient tellement différents ... Après moult hésitations et de fil en aiguille,le moment était cependant arrivé.
Elle avait choisi le plus beau des arbres, magnifiquement campé sur de grosses racines noueuses. Elle le voyait, réellement, tel qu'il était, tellement beau et un grand charme émanant de lui. Il s'élançait fièrement vers les hauteurs, droit comme un if, pour atteindre les caresses du soleil. Ouverture des plus prometteuses, il la mit rapidement dans un état second. Il était une invitation à atteindre le septième ciel.
Chose surprenante, elle était nue ... Elle l'embrassa timidement, mettant dans ce baiser tous ses espoirs. Le contact établi, elle sentit sa générosité et sa force et, se sentant autorisée, commença à s'élever.
Dés le début, ce fut différent. Elle attouchait l'écorce rugueuse, cherchant des prises. Ses doigts hésitants tâtonnaient, en débutante qu'elle était. Trouvant ça et là érections ou autres tumescences végétales, elle les saisissait avec fébrilité. La difficulté initiale surmontée et le désir persistant, elle poursuivit Molto Vivace. Et le trouble apparut, l'envahissant peu à peu. Le plaisir était là, indéniable! Tout son corps se durcit alors, près à l'effort et s'ouvrant aux sensations plaisantes. Percevant une réponse de celui qu'elle avait choisi, elle admit alors ne pas être la sol(o)iste qu'elle croyait. Pour elle, Ô délice!, il s'effeuillait de temps à autres. Bientôt, elle gémit à chaque fane frôlant sa peau. Que ce soit sur la zone délicate entre ses deux seins ou celle de ses cuisses musclées, toute caresse végétale déclenchait une exquise chair de poule.
Elle ne voyait plus que lui.
Il ne sentait qu'elle.
Le temps s'était arrêté. Ils étaient seuls sur scène, entre récitatifs et arias, les c(h)œurs attendant de partir dans une belle envolée lyrique.
L'alchimie opérant, elle progressait maintenant avec assurance, sans craindre la hauteur. Elle expérimentait l'euphorie de la liberté, et sa libido s'en trouva décuplée. Bientôt, elle se sentit humide, son corps en sueur et un précieux nectar poignant de son bas-ventre. Elle lutta contre elle-même pour ne pas s'abandonner, l'embrassant avec plus d'ardeur. Et lui? ...
Il l'aimait. Elle en était sûre! Sa végétation était devenue luxuriante. Ses feuilles arboraient un vert plus vif que jamais et, sa sève bouillonnait fougueusement en son intérieur.
Soudain, il y eut quelque chose de furtif et délicieux, un échange inattendu d'énergie. Alors, submergée, elle se laissa emporter par la puissance des sentiments. Traversée par une violente secousse elle fût arrachée à son étreinte et tomba. Elle n'avait pas atteint le sommet mais la quintessence du plaisir.
Sa chute fût sans fin. Elle tenta de se raccrocher à ce qu'elle pouvait, feuilles fuyantes, branches cassantes ... Elle croyait l'entendre hurler sa frustration. Elle avait accepté ce plongeon tragique et infini quand, tout à coup, ils renouèrent leur union. Surprise, elle regarda son corps: Des lianes l'enlaçaient ...
La danse pouvait donc durer encore et encore ...
...
Bien plus tard, sous l'œil attendri du dieu soleil et ayant quitté le monde merveilleux de ses rêves les plus fous, Eliane regarda la paroi et s'élança, seule ...
Aurore Delahaye
"J’appréciais beaucoup Aurore qui était une C2C-iste et une passionnée du Canigou. Elle m’avait offert d’y aller avec moi lors de mon prochain voyage en France. Je lui ai expliqué que je ne fais plus d’alpinisme depuis longtemps et que de toute façon elle devait être trop légère pour m’assurer. Elle avait un plume incroyable et aurait pu en vivre.
Que faire? Pour le concours??
Et bien je vais offrir le texte d’Aurore à tous comme lecture hors concours. Il est excellent et j’aimerais bien qu’on puisse le garder en quelque part en mémoire, pour ne pas oublier. Vous savez, comme tous ceux qui avaient la passion et qui sont passés avant nous …
C’est la première fois qu’une telle chose m’arrive et, bien que blindé face à la mort – la mienne comme celle des autres – j’ai horreur des disparitions et de l’oubli. On est réellement mort que lorsque plus personne ne pense à nous!
Si quelqu’un a une idée pour faire vivre son texte à jamais, qu’il me le fasse savoir. Pour le moment, vous pouvez le lire sur votre site web favori.
La montagne est une maîtresse cruelle. Mais qu’est l’existence sans l’amour d’une maîtresse? Une vie sans passion???"
Éliane
Les lianes l'enlaçaient ...
Elle était là, au milieu de nulle part, en tenue d'Eve, des cordes végétales courant sur son corps sublimé par l'effort. Elle baignait dans le bonheur, approchant les sommets du plaisir. C'était complètement irréel.
Elle était pourtant l'Alice du pays où grimper rime avec cordée. La corde ... Elle aimait la sentir qui l'ancrait à l'autre, alliance de sensualité et sécurité, pour le meilleur ou pour le pire ... Pour jouir pleinement et maintenir la tension jusqu'au bout, elle savait devoir soumettre son corps aux règles de matelotage et elle avait appris l'art des manip's.
Son imagination n'ayant, elle, aucune attache, elle était Ariane, Pénélope ou une autre, liée à un Cupidon et "condamnée" à le poursuivre toujours plus haut.
La cordée prenant corps, tous deux s'ébattaient ensuite dans un jeu de chat perché un peu particulier. Parfois, elle en prenait les commandes, s'essayant à la direction de l'orchestre avec doigté, pour une interprétation du topo qu'elle espérait Magnificat...
Qu'importe la position et quelle que soit la clef, le plaisir pouvait apparaître. Dans ces moments, ni le temps, ni la mesure ne comptaient. Elle savait que, tôt ou tard, elle arriverait à l'acmé où ils se rejoindraient. Alors, la corde ne serait plus nécessaire et, les noeuds disparus, leurs corps se loveraient l'un sur l'autre et elle (ils) crierai(en)t son (leur) bonheur, celui de toucher les cieux ...
Mais là, elle était seule, libérée de toute entrave, pour jouer autrement et, peut-être, atteindre une autre extase. Son compagnon en avait fait l'expérience mais leurs vibrato étaient tellement différents ... Après moult hésitations et de fil en aiguille,le moment était cependant arrivé.
Elle avait choisi le plus beau des arbres, magnifiquement campé sur de grosses racines noueuses. Elle le voyait, réellement, tel qu'il était, tellement beau et un grand charme émanant de lui. Il s'élançait fièrement vers les hauteurs, droit comme un if, pour atteindre les caresses du soleil. Ouverture des plus prometteuses, il la mit rapidement dans un état second. Il était une invitation à atteindre le septième ciel.
Chose surprenante, elle était nue ... Elle l'embrassa timidement, mettant dans ce baiser tous ses espoirs. Le contact établi, elle sentit sa générosité et sa force et, se sentant autorisée, commença à s'élever.
Dés le début, ce fut différent. Elle attouchait l'écorce rugueuse, cherchant des prises. Ses doigts hésitants tâtonnaient, en débutante qu'elle était. Trouvant ça et là érections ou autres tumescences végétales, elle les saisissait avec fébrilité. La difficulté initiale surmontée et le désir persistant, elle poursuivit Molto Vivace. Et le trouble apparut, l'envahissant peu à peu. Le plaisir était là, indéniable! Tout son corps se durcit alors, près à l'effort et s'ouvrant aux sensations plaisantes. Percevant une réponse de celui qu'elle avait choisi, elle admit alors ne pas être la sol(o)iste qu'elle croyait. Pour elle, Ô délice!, il s'effeuillait de temps à autres. Bientôt, elle gémit à chaque fane frôlant sa peau. Que ce soit sur la zone délicate entre ses deux seins ou celle de ses cuisses musclées, toute caresse végétale déclenchait une exquise chair de poule.
Elle ne voyait plus que lui.
Il ne sentait qu'elle.
Le temps s'était arrêté. Ils étaient seuls sur scène, entre récitatifs et arias, les c(h)œurs attendant de partir dans une belle envolée lyrique.
L'alchimie opérant, elle progressait maintenant avec assurance, sans craindre la hauteur. Elle expérimentait l'euphorie de la liberté, et sa libido s'en trouva décuplée. Bientôt, elle se sentit humide, son corps en sueur et un précieux nectar poignant de son bas-ventre. Elle lutta contre elle-même pour ne pas s'abandonner, l'embrassant avec plus d'ardeur. Et lui? ...
Il l'aimait. Elle en était sûre! Sa végétation était devenue luxuriante. Ses feuilles arboraient un vert plus vif que jamais et, sa sève bouillonnait fougueusement en son intérieur.
Soudain, il y eut quelque chose de furtif et délicieux, un échange inattendu d'énergie. Alors, submergée, elle se laissa emporter par la puissance des sentiments. Traversée par une violente secousse elle fût arrachée à son étreinte et tomba. Elle n'avait pas atteint le sommet mais la quintessence du plaisir.
Sa chute fût sans fin. Elle tenta de se raccrocher à ce qu'elle pouvait, feuilles fuyantes, branches cassantes ... Elle croyait l'entendre hurler sa frustration. Elle avait accepté ce plongeon tragique et infini quand, tout à coup, ils renouèrent leur union. Surprise, elle regarda son corps: Des lianes l'enlaçaient ...
La danse pouvait donc durer encore et encore ...
...
Bien plus tard, sous l'œil attendri du dieu soleil et ayant quitté le monde merveilleux de ses rêves les plus fous, Eliane regarda la paroi et s'élança, seule ...
Aurore Delahaye
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